Melancholia...
Et nous reviennent à l’esprit la gravure de Dürer représentant une femme ailée songeuse, le saturnisme, la médecine médiévale, la bile noire dont l’excès peut être considéré comme néfaste, le romantisme allemand des origines dans ce qu’il a de plus tragique, Ophélie de John Everett…
Comment, se demande le spectateur, comment Lars Von Trier peut-il parvenir à nous emporter dans cet improbable tourbillon ?
Parce qu’il l’ancre d’abord dans le réel, ce qu’il a toujours su faire avec ses camarades du Dogme 95. Que l’on songe au mariage et à ce qu’il dénonce de la société bourgeoise, de ses codes, de sa cupidité, de sa vénalité, de sa trivialité… Lars Von Trier comme Vinterberg dans Festen, caméra à l’épaule, nous plonge au plus près du drame familial qui se noue et implose, pour que nous y assistions en témoins.
Il insère ensuite progressivement l’humeur noire, la profonde mélancolie, ces cordes laineuses qui semblent retenir votre avancée, la poésie, le fantastique… la femme hors norme, la femme malade, l’hystérique n’est-elle pas au final l’élue qui détient la vérité grâce à son extrême sensibilité, à son intransigeance qui font d’elle un être pur ? L’humanité n’est pas là où on l’attend… pas auprès de la science, de ses scientifiques et de leurs statistiques… sur cette Terre qui va bientôt être détruite, rien n’a de valeur… Soudain, un cercle de fer et une hutte en quatre branches, objets naïfs, représentations de l’innocence et de la pureté enfantines, prennent plus de valeur que le monde impur et pétri de certitudes des adultes.
