S'ouvrir à de nouveaux horizons

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Ne laissez plus chez vous cette partie de vous-même qui constitue votre identité propre : faites du cinéma ! Epanouissez-vous dans un projet de film, développez vos compétences artistiques, aiguisez votre regard, venez à la rencontre de l'autre, développez votre esprit critique, améliorez votre maîtrise des outils du cinéma et de l'audiovisuel, et ouvrez-vous à l'international !

dimanche 28 avril 2024

Affiche du film Renoir

          Oui, ce qui marque le plus dans ce film c'est le travail sur la lumière, chaude, et le jeu sur les teintes d'orange, d'ocre ou de rouge dont la déclinaison semble infinie sous le pinceau de Gilles Bourdos et de son directeur de photographie Mark Ping Bing Lee.

        On aime la métaphore du pinceau nettoyé dans l'eau duquel se dilue la peinture orangée qui s'insinue tourbillonnante et légère comme le poison amoureux s'insinue dans le coeur des hommes sans que l'on ne puisse rien y faire... On repense alors à Hable con ella d'Almodovar et cette fameuse scène animée où quelques gouttes d'un liquide rouge sont versées dans un autre liquide pour signifier le viol de manière biologique et esthétique.

 Parle avec elle

Hable con ella, Almodovar  (2001)

     On aime la métaphore plus macabre de la baignade : caméra en contre-plongée dans l'eau montrant les corps flottant sur le dos comme autant de cadavres dans leur linceul...

   On aime les rouges des tenues des baigneuses, pieds dans la rivière et ombrelles au vent... on aime voir à travers le regard un peu flou de Renoir pour mieux apprécier la lumière et les couleurs sans le souci d'un quelconque figuratif...

     On aime la représentation du cinéma, des ombres chinoises à la projection, qui évoque le grand avenir de Jean...

      On aime ces petites morales merveilleusement dites et interprétées par ce si grand acteur qu'est Michel Bouquet : "Jamais de noir chez les Renoir, on n'est pas là pour broyer du noir, d'autres s'en chargent déjà très bien", "La chair c'est l'essentiel", "C'est la couleur qui fait tout dans une toile", "Laisse toi aller comme un bouchon sur l'eau"...

      On aime quand la caméra va du jardin à l'atelier, privilégiant l'absence de cloison au cut, pour montrer combien est ténue, dans l'oeuvre de Renoir, la frontière entre la vie et la peinture...

      On aime les travellings-avant dans le couloir de la maison, au chandelier... On aime cette nature embellie par le soleil couchant... On aime à observer le corps d'Andrée posant devant l'artiste, dévoilant ses formes harmonieuses et le velouté de peau que Renoir apprécie tant...

      Mais voilà, malgré cet énorme travail esthétique et poétique qui ravit les contemplatifs, certains trouveront que le film demeure plombé par le genre du biopic, par le souci du réalisateur de demeurer fidèle à la peinture et au rythme de la vie d'un Renoir en fin de vie. Sans doute avons-nous perdu le sens de la pause, de l'attente, de la lenteur comme nécessaires à une création artistique et à la rêverie.

     Ainsi, en ce qui concerne l'intensité dramatique, malgré la musique très suggestive d'Alexandre Desplat (Moonrise Kingdom, De rouille et d'os, The Tree of Life, The Ghost Writer, King's Speech, Benjamin Button...) nous laissant comprendre que le pire est sous-jacent et donc sur le point d'arriver, rien n'arrive vraiment, pas de réelle envolée, ni dramatique, ni lyrique, ni tragique d'ailleurs. Chaque possibilité est comme un peu étouffée dans l'oeuf : Gabrielle (l'invitée tant attendue est, une fois présente, traitée de manière allusive et un chant de combattant finit de l'estomper), le cadet (un caractère bien amorcé avec son intérêt malsain pour le morbide dans lequel il baigne depuis tout petit, mais dont on ne sait pas ce qu'il devient ensuite) la rencontre amoureuse (sans réelle progression quant à l'amour et la complicité, quelques scènes  avec lesquelles il nous faut construire un grand amour), la guerre (là aussi peu convaincant et seulement allusif en ce qui concerne son horreur, le tourment qu'elle peut générer, même la culpabilité d'avoir laissé les copains n'est pas très bien interprétée). En fait, le point de vue subjectif, voire l'introspection, manquent à l'appel pour créer l'empathie. A force d'espionner derrière un rideau de dentelle ou un buisson, nous vivons tout cela un peu trop de l'extérieur. Peut-être aussi que ce jeune acteur qu'est Vincent Rottiers manque un peu de profondeur.

      Toutefois deux moments bouleversants nous sont offerts : lorsque nous découvrons en travelling-avant le paysage méditerrannéen qui s'offre à Jean, à son retour, de la fenêtre de la terrasse vers laquelle il s'avance lentement (à couper le souffle,  les larmes montent aux yeux), et lorsque Renoir utilise toutes ses forces pour se lever de son fauteuil afin de dire adieu à son fils qui repart pour la guerre (ces larmes, ici, nous ne pouvons plus les retenir).

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